Sous la farce du remaniement, la crise du sarkozysme
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10 Novembre 2010 Par
C'est dans les gènes de la Ve République: compte tenu du rôle mineur qui est dévolu au premier ministre et au gouvernement, un remaniement n'a jamais grande importance. Pour le président de la République, quel qu'il soit, l'opération n'est, le plus souvent, que le prétexte à quelques ajustements humains ou l'occasion de quelques inflexions politiques, principalement dans les domaines économiques ou sociaux.
On aurait pourtant tort de ne pas prêter attention à la mise en scène du remaniement que prépare Nicolas Sarkozy. Car ce dernier use et abuse tellement du pouvoir exorbitant que lui confèrent les institutions néo-bonapartistes de la Ve République, que la manœuvre à venir aura tout de la parodie: une médiocre et consternante opération de communication dans l'espoir – vain – de tourner la page de la crise sociale (réforme des retraites) et des scandales d'Etat (affaire Karachi et Bettencourt). Juste une farce, pour occuper les journaux télévisés JT de 20 heures des grandes chaînes et donner l'impression de garder la main.
Le remaniement qui vient dit beaucoup de ce qu'est le sarkozysme, les ressorts inquiétants qui l'animent, les libertés qu'il prend avec les mécanismes de notre démocratie. Mais il révèle tout de la crise de plus en plus grave qui ronge la droite.
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Ces mots, écrits voilà 46 ans, semblent avoir été spécialement ciselés pour décrire la pratique sarkozienne des institutions. Mais poursuivons... «Il y a en France des ministres, moque François Mitterrand. On murmure même qu'il y a encore un premier ministre. Mais il n'y a plus de gouvernement. Seul le président de la République ordonne et décide. Certes les ministres sont appelés rituellement à lui fournir assistance et conseil. Mais comme les chérubins de l'Ancien Testament, ils n'occupent qu'un rang modeste dans la hiérarchie des serviteurs élus et ne remplissent leur auguste office qu'après avoir attendu qu'on les sonne.»
«On murmure même qu'il y a encore un premier ministre...» À lire cette féroce formule, on ne croirait pas qu'elle a été écrite à une époque où Georges Pompidou était premier ministre, lui qui possédait une personnalité et une consistance supérieures à celles de bien des dirigeants de la droite française actuelle. On pourrait penser qu'elle vise François Fillon.