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Publié par christian guittard

source et suite de l'article www.mediapart.fr par Edwy Plenel

Un abîme est devant nous, où nous entraîne une politique sans hauteur qui, depuis mai 2012, n’a cessé de plier devant les obstacles – européens, financiers, institutionnels. Cet étrange renoncement ne sauvera rien, pas même la gauche au pouvoir dont l’impuissance face au désastre social de 2013 appellera une sanction électorale en 2014. Contre cette triste pédagogie de la fatalité et de la résignation, personne ne nous sauvera, sauf nous-mêmes : il nous revient à tous, entre audaces individuelles et défis collectifs, d’ouvrir l’avenir en inventant l’inconnu.

« Ils gouvernaient comme ils avaient vécu, par adaptations successives » : cette ancienne citation m’est revenue comme une évidence depuis que François Hollande est devenu président de la République et que se succèdent, sur les fronts essentiels, reculs et faiblesses, concessions et conformismes, présidentialisme continué, Europe inchangée et finance confortée, urgences prises pour l’essentiel tandis que l’urgence ne va pas à l’essentiel, et tout ce temps perdu qui ne se regagnera jamais…

Ma mémoire l’ayant quelque peu transformée, la voici, rendue à son exactitude : « Dans l’impossibilité d’asseoir leur autorité sur la force d’un symbole (…), ils gouvernèrent comme ils avaient vécu, à coup d’imperceptibles adaptations. » C’est de François Mitterrand, aux premières pages du Coup d’État permanent (1964), ce réquisitoire contre cette Cinquième République bonapartiste dont il sera le premier président socialiste, inaugurant une conversion institutionnelle fatale à l’altérité démocratique et sociale de la gauche française.

Mitterrand y décrit son propre monde, la classe politique dont il fut avec zèle et dont il s’efforce alors de réchapper, celle de l’après-guerre qui, échouant à sauver la République du désastre colonial, finira dans les bras d’un militaire sauveur, comme trop souvent en France depuis Napoléon. « Parvenus au premier rang, écrit-il d’une plume acérée, mais incapables de trouver en eux-mêmes la force de créer un ordre nouveau, tournés vers le passé, ses usages et ses rites, ils se dépêchèrent d’imiter l’ordre ancien… » Et de conclure que « ce n’est pas par excès de démocratie que la Quatrième République a dépéri mais par peur de la démocratie, par timidité à l’égard du peuple ».

Si je convoque cette référence, c’est pour tenter de cerner cette énigme : ce fait que la présidence Hollande a réussi, en une moitié d’année, cette prouesse de décevoir même ceux qui, avertis des limites du Parti socialiste, ne se faisaient aucune illusion. Mais qui pariaient, au moins, sur la dynamique d’un vote dont les exigences ne seraient pas aussitôt remisées ou dévaluées. Loin d’un chèque en blanc, se débarrasser du sarkozysme, de son hystérie politicienne et de sa droitisation extrême, c’était en effet, par la force du suffrage, mettre à l’ordre du jour tout ce que la présidence sortante avait incarné et qu’il fallait absolument défaire. Non pas le style, mais la ligne. Non pas l’apparence, mais la consistance.

Le candidat le savait pertinemment qui, une fois sorti vainqueur des primaires socialistes par habile prudence plutôt que par forte conviction, finit par accélérer sa campagne, la positionner et la construire sur les trois questions centrales de l’heure. Celles du bilan de Nicolas Sarkozy tout autant que celles de la crise de civilisation qui nous saisit : les questions de l’Europe, de la finance et de la démocratie. Car que promettait François Hollande ? De réorienter l’Europe, de combattre la finance, d’instaurer une présidence normale. Or que reste-t-il de ces trois engagements ? Presque rien ou l’exact contraire, dans tous les cas pas grand-chose.

Les derniers rendez-vous européens ont montré une France isolée face à un tandem germano-britannique donnant le la d’une Europe plus indifférente que jamais à ses peuples, utilisant la récession pour forcer l’austérité tandis que le pacte de croissance dont se targuait François Hollande est déjà oublié. L’avorton de réforme bancaire obtenu par les lobbys financiers marque le deuil de la grande mise en ordre promise afin d’enrayer les ravages de la spéculation, repartie de plus belle malgré sa responsabilité avérée dans la crise actuelle. Quant à la démocratisation de la vie publique dont le seul coût est de volonté politique, elle est en panne, la réforme constitutionnelle bel et bien encalminée, le cumul des mandats reporté aux calendes, la refondation de la liberté de l’information pas à l’ordre du jour.

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M
The financial deals made by the European countries in this year are not that bad. They already faced many problems because of recession. I should say this move is an intelligent one and do them good in future. Thanks for sharing your views on it.
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