Selon le récit du Monde,
l'enquête visant les sources du journaliste Gérard Davet a été déclenchée par sa révélation, à la mi-juillet, d'un procès-verbal d'audition de Patrice de Maistre, le gestionnaire de
fortune de Liliane Bettencourt, mettant en difficulté Eric Woerth sur les conditions d'embauche de son épouse. Légitimes et d'intérêt public, puisque concernant une éventuelle prise
illégale d'intérêt d'un ministre en exercice, ces informations ne relèvent en rien de la sécurité ou de la défense nationale. Elles touchent à la vie démocratique, par l'exercice
normal du droit fondamental à l'information, ce droit de savoir des citoyens.
Or, écrit Le
Monde, «la
publication de ces informations, à quelques jours de l'audition de M. Woerth par les policiers, prévue fin juillet a, selon des sources proches du dossier, particulièrement irrité
l'Elysée», lequel a depuis «totalement» démenti,
affirmant n'avoir pas «donné la
moindre instruction».
Les sources du Monde comme
celles de Mediapart, au sein du monde policier, tant à la Direction générale de la police nationale (DGPN) qu'à la DCRI, qui en dépend, n'accordent aucun crédit à ce démenti de pure
forme. Tout au contraire, elles confirment, pour reprendre le récit de nos confrères qu'«ordre a été
donné à la DGPN de mettre fin aux fuites qui avaient abouti à la publication de ces informations» et que «les services
de la DCRI, c'est-à-dire du contre-espionnage français, ont été mis à contribution hors procédure judiciaire».
«Parmi les
personnes qui pouvaient avoir accès aux procès-verbaux des auditions, poursuit Le
Monde, ils se sont
arrêtés sur un haut fonctionnaire, David Sénat, conseiller pénal de la garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie. Le téléphone administratif de ce dernier a fait l'objet de discrètes
expertises techniques. Les identités des personnes ayant contacté ce membre de l'appareil d'Etat ont été remises à la DCRI par un opérateur téléphonique, sous forme d'un listing.
C'est à cette occasion que le nom de Gérard Davet, journaliste au Monde, est apparu.
La DCRI – qui a assuré au Monde avoir
agi dans le cadre de sa "mission de protection des intérêts de l'Etat" – a
transmis, courant juillet, ses conclusions à l'Elysée, pensant avoir identifié la source du Monde. La
hiérarchie du haut fonctionnaire soupçonné, David Sénat, conseiller pénal au cabinet de la garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie, a été sommée de le convoquer. Il a été appelé à
quitter ses fonctions, et s'est vu proposer une "mission de préfiguration" pour la mise en place de la cour d'appel de Cayenne, en Guyane.»