Le naufrage du journalisme politique
Le naufrage du journalisme politique
13 MARS 2016 | PAR LAURENT MAUDUIT : source et suite de l'article www.mediapart.fr
Alain Minc a reçu samedi le prix du livre politique 2016. Cette récompense attribuée par une trentaine de hiérarques de la presse vient confirmer le triste naufrage du journalisme politique, tel qu'il est conçu dans les grands médias, et combien le journalisme de connivence tient encore le haut du pavé.
C'est une information microscopique qui n’a aucun intérêt par elle-même : Alain Minc a reçu samedi le prix du Livre politique 2016. Mais c’est une information qui en cache une autre, beaucoup plus importante : elle vient confirmer que le journalisme de connivence à la française tient encore le haut du pavé, puisque c’est une belle brochette d’éditorialistes des grands médias français qui a eu la stupéfiante idée de récompenser un essayiste qui, dans le passé, a déjà été condamné pour plagiat.
Membre du jury, l’éditorialiste du Journal du dimancheDominique de Montvalon raconte dans ces termes sur le site Internet de la publication comment les choses se sont passées : « Après des explications de vote parfois passionnées, le livre de Minc a recueilli au 1er tour 9 voix et les autres livres, ex-æquo, 8 voix chacun. Au second tour, après de nouvelles explications de vote, l'essai d'Alain Minc a recueilli 10 voix, l'emportant donc, devançant Le Mauvais Génie d'une voix, le livre de Gilles Finchelstein n'en obtenant plus “que” 6. »
Ainsi, il s’est trouvé une majorité d’éditorialistes de ce qu’il est convenu d’appeler la grande presse pour voter en faveur de l’entremetteur du capitalisme parisien, ancien conseiller occulte de Nicolas Sarkozy reconverti aujourd’hui dans la campagne en faveur d’Alain Juppé, qui tout au long de sa carrière intellectuelle n’a cessé de se tromper.
N’a-t-il pas annoncé la balkanisation de l’Europe quelques semaines avant que le Mur ne s’effondre ? Le 5 janvier 2008, alors qu’une crise financière historique avait déjà commencé à secouer la planète, n’a-t-il pas proféré sur Direct 8 l’une de ces âneries dont il a le secret ? « On nous aurait dit que le système financier serait régulé avec un doigté tel qu’il évitera une crise, une crise qui aurait pu être de l’ampleur des très grandes crises financières du passé. C’est quand même un univers très résilient qui finalement, sans qu’il y ait d’organe apparent de régulation, est très bien régulé, quand même. Le jeu conjugué des banques et même des gouvernements, on se dit l’empirisme en réalité prévaut au-delà des postures idéologiques, et l’économie mondiale est plutôt bien gérée. »